Utopie de la psychologie et psychologie de l’utopie

L'homme et son inconscient 1

L'homme et son inconscient 1

L'homme et son inconscient 2

L'homme et son inconscient 2

La psychologie a pour but d’expliquer, avec le renfort de la méthode expérimentale, notre vie mentale. Comme toute science, la psychologie a son utopie : établir une cartographie précise et complète de notre psychisme.

L’héritage antique et plus récemment celui des Lumières font de l’homme un être rationnel doué de conscience. Avec la découverte de l’inconscient par le neurologue autrichien Sigmund Freud, c’est une part de nous qui échappe à la raison. Il s’agit à l’époque d’une révolution intellectuelle et culturelle qui heurte la morale chrétienne : l’homme n’est plus guidé par la volonté de Dieu mais par des désirs sexuels profonds. De plus, la découverte de Freud ramène l’homme à un état sauvage, ce qui contredit le mythe du progrès de la civilisation

Quelles sont les parties émergentes de cet inconscient, qui prouvent son existence ? D’abord les fameux lapsus. Ces petits mots dérangeants qui se substituent à d'autres. Ils sont la marque d’un discours inconscient dont les éléments dérivent parfois vers le discours conscient. Puis il y a les rêves : tout le monde rêve et il demeure souvent un sentiment d’étrangeté lorsqu’on s’y arrête. Ces rêves traduisent un désir ou une peur souvent inavouables pour le sujet car dangereux. Ces éléments sont interprétés comme des signes de l’inconscient.

La tentative de Freud pour localiser les différentes instances qui travaillent en notre inconscient aboutit à la création de topiques. Freud distingue trois parties : le ça, le moi et le surmoi. Le ça est un réservoir pulsionnel, d’où partent tous les désirs sexuels. Le surmoi intériorise les interdits culturels, les codes, les valeurs, les normes de la société. Il est une sorte de gendarme face aux débordements du ça. Enfin il y a le moi, qui doit s’efforcer de maintenir l’équilibre entre les deux autres instances.

Leibniz, Nietzsche ou encore Gustave le Bon auraient théorisé l’inconscient avant Freud. Gustave Le Bon, sociologue de formation médicale du début du XXe siècle, explique l’utopie en tant que tension de l’homme vers quelque chose de mieux. Le Bon n’a pas pour but de topographier le psychisme humain. Il montre par l’étude des foules que l’inconscient est « visible » et accessible dans la mesure où les individus s’agglomèrent. Pour lui, la foule se caractérise par sa tendance à l’action, son instabilité, sa réceptivité et une incroyable suggestibilité : la foule est perméable au discours.

La foule rêve. Mais son rêve n’est pas le rêve freudien. Ou presque pas. Le ça, l’instance pulsionnelle est entièrement en œuvre dans la foule. Elle n’est qu’animalité et se meut sur ce mode. «  Passer de la barbarie à la civilisation en poursuivant un rêve, puis décliner et mourir dès que ce rêve a perdu sa force, tel et le cycle de la vie d’un peuple. » Le Bon ne dit pas que le rêve est atteint, mais qu’il perd sa force. C’est ce qui caractérise les courants utopiques : ils connaissent un dynamisme, s’affaiblissent, puis fanent et ce ainsi de suite. C’est donc ce rythme et cette dimension inatteignables qui sont au cœur du rapport entre les hommes et l’utopie.

Marc Bouhet

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